Concert Messaline/Ange, La Tannerie, Bourg-en-Bresse, 7 mars 2020

Concert Messaline/Ange, La Tannerie, Bourg-en-Bresse (Ain), 7 mars 2020

Après un passage au Trianon, les 31 janvier 2020 et 1er février 2020, marquant le début de la tournée des 50 ans d’Ange « Toute une vie d’Ange », le « band » se déplace en province. A l’inverse de la plupart des artistes. Ange tient notamment à saluer la fidélité de son public (de province) qui l’a toujours soutenu, même si selon Christian Décamps, « le Trianon a un air de théâtre de province ».

Le onzième arrêt, était donc, non à la gare de Troyes, mais à celle de Bourg-en-Bresse ce samedi 7 mars 2020. Etape que nos anges heureux connaissent pour y avoir joué notamment en 2013 avec le même groupe local de Hard Rock, « Made in Bresse », « Messaline ». Qui s’est d’ailleurs chargé de faire venir Ange (via Messaprod).

La date promettait d’être belle. Unique. Elle l’a été au-delà… du délire.

Christian Décamps égal à lui-même lors de l’entretien que nous avons eu le privilège d’avoir, accompagnés par Radio Royans. Toujours truculent, intarissable, accueillant (interview à paraître).

Messaline scandaleusement talentueuse met « La Tannerie » dans sa poche

La première partie du concert assurée par Messaline, avec un line-up de deux ans d’âge, les petits nouveaux, Alain Blanc (batterie), et Mathieu Gilbert (lead guitare), les deux piliers Jaime Contreras (basse) et Eric Martelat alias « Chattos », au chant et aux textes (en français), nous concocta en apéritif, un warm-up de fort bon calibre. Messaline, fille spirituel d’Ange ? Avec ses qualités, toutes ses qualités, physiques : l’énergie qui coule en vagues incandescentes de la bouche de Lucifer directement vers les fans enamouré(e)s (oui, oui, Messaline draine elle aussi ses fans). Les quatre (de Messaline) n’ont rien de simples bûcherons du Hard Rock. La puissance  présente (quel solo d’Alain Blanc !), la basse de Jaime toujours sobre, efficace, et la finesse des solis de Mathieu.

Un hommage « Au Pourpre profond » se glissa, en fin de set, joute guitaristique et orale entre Mathieu et Chattos !

Résultat, un set, puissant, huilé, revisitant des titres de « l’Hôtel des Possédés« . Ou nous gratifiant de nouveaux, bien pêchus, entraînants, ce qui n’est pas incompatible (album à sortir en 2021). La cuvée du 7 mars 2020 était vraiment (très) bonne : Messaline se bonifie avec le temps.

A l’inverse du vin qui pourrait être (trop) jeune, Messaline a franchement du corps. Une saveur bien trempée, qui a eu le bonheur de se renforcer sur les costières du Bugey, ou au bord des étangs de la Dombes, sans doute. A quoi marche notre Messaline ?

Sans doute, elle s’alimente, dans les pays de l’Ain et ses multiples terroirs des spécialités culinaires bien connues, grenouilles, brochets, poulets (de Bresse). De breuvages au goût subtil. Elle y trouve ses origines, ses sources d’inspiration, sa singularité.

Comme dit, avec humour, Chattos, le chanteur, leur tube « Mise en Abyme » a été jusqu’aux limites… de la Dombes ! Messaline mérite d’être connue, savourée (bien) au-delà de cette douce région.

Digne représentante au niveau du Hard Rock, et de la langue française au sein de l’Académie de Bresse ? Elle mériterait d’y être nominée et nommée…

Spécialité rock brûlant, mitonnée aux petits oignons, verve, et patte de Chattos. Le bonimenteur de foule de la Tannerie (près de cinq cents cinquante personnes), a fait sourire, reprendre des refrains, tâche qui n’est pas donnée à tout le monde. Tout en jouant « à domicile », Messaline montre qu’elle a de la bouteille, du métier. Son frontman tel une carpe dans son étang, virevolte, saute, d’un mot à un autre, bouge  d’un endroit à l’autre de la scène, délice (g)astronomique, auditif et visuel. D’autant que ses acolytes ne sont pas les derniers à le suivre dans ce manège enchanté, avec chacun leur personnalité. Quel groupe font-ils !

La Messaline nouvelle est bel et bien arrivée avant le Beaujolais (nouveau). Délicatesse textuelle, raffinée, diablement ciselée, musiques burnées : Messaline est un véritable « gang » de live. Qui n’a plus rien à envier à Ange (d’ailleurs depuis un bail). Ce concert mythique est, celui, non, de la rupture avec Ange. Mais une confirmation : Messaline au fil des temps, est bien la « Fille d’Ange ». Avec sa propre marque de fabrique, ses saveurs, ses onguents, ses airs ensorcelants. Faut-il y voir l’empreinte de Lucifer ? Toujours est-il que la voir ainsi fût salutaire, réconfortant et prometteur ! Ce set fût intense… Comme tout à une fin (dit-on) au bout de ¾ d’heure, la messe (satanique?) était dite, place à Ange .

MESSALINE

Ange 2020 : toujours vivant

Si Messaline a renouvelé son line-up, Ange 2020 tourne avec les mêmes membres depuis vingt cinq ans. Ce n’est pas un hasard. Noces d’Or depuis la création du groupe (dixit Christian Décamps) et…d’argent pour la formation actuelle. Double accessit.

Ange qui selon Christian Décamps est « le groupe français le plus célèbre… à être passé inaperçu » plane toujours sur la scène rock française avec recul, sa propre philosophie, son art de vivre ; sa façon de raconter, de mettre en musique la vraie vie. La nôtre. La leur. Avec verve, poésie, richesse des mots, servie par des musiciens brillantissimes mettant leur technique, leur sensibilité, au service du groupe.

Distinguer l’un d’entre eux serait faire ombrage aux autres. Finesse des arabesques d’Hassan à la guitare, puissance des lignes de basse de Thierry, batterie précise de Benoît, claviers clairs et virevoltants de Tristan (sa voix aussi) ; sans oublier le maître de cérémonie, Christian, changeant de costumes selon les titres, en père Noël, en « capitaine coeur de miel », la scénographie est irréprochable,  Chrsitain toujours le même charisme, la même voix.

Les années passent, le talent reste. Et se transmet. A l’origine, il y eut le « père Décamps », son frère Francis, puis le fils, Tristan, et les autres musiciens… Légende vivante du rock  progressif ? Une liste longue comme un parchemin du Moyen-âge. En 2020, Ange est toujours plus qu’un groupe, une famille élargie. Une tribu. Qui englobe ses fans (trois générations). Il suffit de la côtoyer pour sentir l’osmose, le désir d’être, de vivre (ensemble), d’être sur scène, de vivre pour et par la scène. Avec un immense respect mutuel.

Cette communication (avec le public), reste toujours aussi forte, charnelle, sensuelle. Christian Décamps a « embarqué »  l’audience de la Tannerie » en un tour de mains.

Show magique, magnifique, onirique, retraçant en un battement d’ailes (d’Ange) les cinquante ans de carrière. Dans ce type de circonstances critiquer est aisé, « ils n’ont pas joué ceci, cela ». Comment en une heure trente faire plaisir à tout le monde ? Passer en revue (le mot est trivial pour Ange), tous les titres emblématiques du groupe. Mission impossible. Le résultat sur scène a été cependant cohérent, plaisant, on ne se lasse pas. On ne se lasse pas de (ré)entendre des morceaux anciens. Ou plus récents. Sans temps mort. Avec des mots simples, teintés de malice, d’humour, de Christian qui font mouche « on est pas ici à une conférence de… Bresse »…

Le public a eu le bonheur, le privilège, de revivre des morceaux anthologie, des bouts de vie (liste non exhaustive ci-après)  :« Du Chien, la Poubelle et la Rose », en passant par « Le Soir du Diable », « Le Ballon de Billy », « Sur la Trace des Fées », « Capitaine Coeur de Miel », pour finir sur l’« Ode à Emile », « Ces gens-là », « Hymne à la Vie »…

«Toute une vie d’Ange  » c’est aussi ceux qui ont fait partie de l’aventure, qui ne sont plus ; qui ne sont pas oubliés. Hommage : la liste des disparus s’égrène, sur des images vidéoprojetées sur le fond de scène.

Applaudissements.

Le groupe salue, la foule s’embrase. Communion…

Par les temps qui courent, ce concert aurait été annulé. Comme tant d’autres. Pour cause sanitaire. Voir Messaline et Ange donner ce sacré concert a été une chance, une bénédiction, une vaccination contre le virus, celui du pessimisme, de l’oubli. Un acte d’amour consenti. Partagé. Une œuvre de santé publique. Quand est-ce que les concerts d’Ange seront-ils remboursés (par la sécurité sociale) ?

Hommage aux artistes du soir, au public, à tous ceux qui ont fait que ce spectacle soit vivant, comme le dit si bien Christian, et ne meurt pas.

L’âme d’Ange est bien éternelle !

Alain Forest Bourg-en-Bresse, 14 mars de l’an de grâce 2020.

ANGE

Interview de Christian Décamps à paraître (dans les jours prochains)

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