Interview Matthias Macchabée (illustrateur) A l’occasion des Awards 2023 de FRANCE METAL.

A l’occasion des France Metal Awards 2023,

Macchabee Artworks awaqrds 2023

 

nous mettons en avant une part importante et  indissociable des musiques « metal »

les illustrateurs et créateurs des artworks  de nos galettes préférés !!!

 

En 2022  avons remarqué que Matthias Macchabée  (Macchabée Artworks) avait réalisé de nombreuses pochettes d’albums pour des groupes français ainsi qu’en 2023 . Nous avons décidé d’en savoir plus sur cette activité pour laquelle il est de plus en plus reconnu et sollicité.

Matthias, pourrais-tu nous dire comment tu en es venu à réaliser des artworks pour des groupes français ? 

Salut les gars et merci avant tout pour cette interview, c’est toujours un plaisir d’échanger un peu autour de mon art, d’autant plus dans le cadre des France Metal Awards ! Comme beaucoup d’artistes je suis tombé dans le dessin quand j’étais petit, et plus particulièrement dans le fantastique, le féérique et l’horreur. J’ai toujours eu un penchant pour ce qui sortait du domaine du réel, et j’ai grandi avec les Gremlins, Le Seigneur des Anneaux, Willow, la série des Chair de Poule, etc. De sorte que je me suis un peu créé mon imaginaire artistique entre les paysages grandioses des grandes épopées fantastiques et les sombres cavernes des monstres tapis dans l’ombre.

C’est à l’adolescence, et surtout au début de l’âge adulte que tout a pris une autre dimension. J’ai appris à jouer de la guitare, puis j’ai mis un pied dans le metal entre la fin du collège et le début du lycée : d’abord AC/DC, puis Metallica, Megadeth et Slayer, avant de découvrir le Death mélo avec Amon Amarth et Arch Enemy, et enfin le Death pagan avec Heathen Foray, Amorphis, Eluveitie, ou encore Heidevolk. 

A 21 ans, j’ai quitté mon Sud natal pour monter faire mes études à Paris, et j’ai intégré le groupe de Death parisien Muertissima, qui m’a fait découvrir le metal extrême, et sans qui aujourd’hui je ne me serais peut-être pas lancé dans l’illustration pour les groupes de metal ! On avait besoin d’un logo, et j’ai proposé de m’y atteler : ça m’a bien plu (comme au reste du groupe) alors je me suis mis en tête de créer des motifs de tee-shirt, puis la pochette de notre premier album Inquisition. Une chose en entraînant une autre, on m’a proposé de bosser sur un autre projet que Muertissima (en l’occurrence, il s’agissait d’Anthropovore), avant que le premier confinement de 2020 ne nous tombe dessus. C’est à ce moment-là que je me suis dit qu’il fallait absolument que je fasse quelque chose de mon art : c’est comme ça que Macchabée Artworks est né.

Depuis, j’ai travaillé sur plus de 200 projets d’artworks et de logos, principalement pour des groupes de metal français.

 

Quelle a été ta formation, comment as-tu développé tes compétences dans ce domaine ?  

Eh bien écoute, je suis entièrement autodidacte et je n’ai jamais suivi de formation particulière pour dessiner ou peindre. Seule la pratique répétitive, la recherche et le temps m’ont permis d’atteindre mon niveau actuel. C’est d’ailleurs quelque chose que je développe encore aujourd’hui, à chaque nouveau dessin, pour chaque nouvelle commande ; car c’est ça qui est génial avec l’art, et en particulier avec les pochettes de metal, c’est en mouvement perpétuel selon l’humeur, le style attendu et les inspirations du moment ! Encore aujourd’hui je galère avec un bon nombre de trucs : certains effets de perspective, les mains, certaines proportions, les étendues d’eau, par exemple. Mais ça ne m’empêche pas de peindre et d’essayer toujours de me renouveler en améliorant ce qu’il y a à améliorer.

 

Pourrais-tu nous dire quelles sont les techniques que tu utilises et celles qui ont ta préférence ? 

J’ai grandi avec toutes les bandes-dessinées emblématiques de chez Soleil et la série des Requiem – Chevalier Vampire, alors je me suis rapidement tourné vers l’aquarelle. C’est une technique qui permet un bon rendu de suite, et qui se transporte aisément n’importe où (car on ne sait jamais où ni quand l’inspiration et l’envie de dessiner peuvent nous tomber dessus !). J’aime ce qui permet de dessiner vite et bien, spontanément et sans trop de détours, car j’ai un naturel assez impatient lorsqu’il s’agit d’art. 

D’ailleurs, c’est ce naturel qui me fait aussi beaucoup aimer la peinture digitale : je ne suis pas limité en termes de format, de mélange des techniques, et je n’ai pas à attendre que mes toiles sèchent ou à me demander comment je vais bien pouvoir scanner l’œuvre une fois terminée. C’est pour ces raisons que la plupart de mes pochettes de metal sont des peintures digitales. J’ai la possibilité de revenir rapidement sur des détails, je peux diviser le dessin en calques que je peux modifier, je peux envoyer des captures d’écran de mes progrès : autant de choses qui facilitent mon travail de va-et-vient avec les clients. Car, forcément, travailler pour un groupe, ce n’est pas pareil que faire de l’art pour soi. Même si ça reste rare, on n’a pas toujours la même vision des choses, et une pochette passe parfois par des étapes nombreuses de reprises et de modifications successives qui la font évoluer de sorte qu’à la fin le groupe comme l’artiste sont contents du résultat.

Enfin, je peins pas mal à l’acrylique ces derniers temps car même si le digital c’est sympa, cela n’a quand même pas grand chose à voir avec la sensation de peindre avec de la vraie peinture. Je suis content de ce petit “retour à la matière” depuis l’an dernier, ça me permet de faire une distinction entre les commandes digitales et les peintures plus personnelles.

 

Comment se passe la relation avec le groupe pour lequel tu réalises un visuel ? Y a-t-il un process de création établi ou bien est-ce différent pour chaque projet ? 

Oui, avec le temps on peut dire que j’ai mis en place un processus de création qui ne change pas beaucoup. Pour la création d’une pochette d’album, je demande souvent aux groupes de me parler de leur nom, des thèmes qu’ils abordent, de leur imaginaire et de ce dont traitera l’opus en question. Si on peut me transmettre aussi les morceaux, c’est l’idéal, mais ce qui importe le plus c’est le travail d’investigation qui vise à cerner le délire du groupe. Après tout, la pochette se veut la vitrine de la musique, une porte d’entrée dans l’univers d’un groupe. 

Donc après les présentations, je me pose devant mon calepin (j’utilise le même pour tous mes travaux) et je dessine. Je réalise un petit croquis (vraiment 10 x 10 cm maximum) de la pochette au crayon à papier histoire d’avoir une bonne vue d’ensemble du rendu, afin de voir si l’image est puissante, si tout est cohérent sous mes yeux car il est important que l’image soit “efficace”. Une fois l’esquisse terminée, je transmets une photo au groupe (accompagnée d’une petite explication), et une fois que j’ai le feu vert je peux me lancer ! Durant la création de la pochette je transmets alors régulièrement des captures d’écran au groupe pour qu’on valide ensemble chaque “grande étape”, jusqu’au moment où l’œuvre est terminée, et que tout le monde est content du résultat.

 

Le fait que tu sois aussi musicien t’aide-t-il dans ton activité artistique, et si oui, de quelle manière ? 

D’une certaine manière on peut dire que ça m’aide oui, tout simplement parce que je peux plus facilement me mettre à la place des groupes avec qui je travaille ! Qu’il s’agisse de la sensibilité à la musique, de la prise en compte des aspects techniques et financiers que peut représenter la sortie d’un album pour un groupe, ou tout simplement de pouvoir discuter et sympathiser plus facilement, être soi-même musicien est un petit plus, oui.

 

Réalises-tu les artworks des projets dans lesquels tu joues ? 

Oui, lorsqu’il s’agit de mes propres groupes (précédemment Muertissima, et actuellement Terreur Nocturne) je m’arrange pour prendre en charge toute la partie artistique. Les logos de Muertissima et de Terreur Nocturne sont de moi, pareil pour les singles, les pochettes d’album et d’EP, les motifs de merch, mais aussi tous les visuels que l’on peut voir sur les réseaux sociaux : c’est bien pratique d’avoir quelqu’un qui gère l’image du groupe en interne, ça permet plus de naturel et de cohérence avec le projet. Et puis, on ne va pas non plus se mentir, c’est un gain considérable pour les finances d’un groupe d’avoir un illustrateur dans ses rangs !

 

D’année en année, le nombre de groupes qui font appel à tes services augmente. Comment expliques-tu que de plus en plus de groupes fassent appel à toi ? 

C’est vraiment très gratifiant, rien qu’au travers des France Metal Awards c’est quelque chose qui est palpable puisque 5 de mes pochettes concouraient en 2021, 9 en 2022 et en ce moment ce sont 15 pochettes que l’on peut retrouver dans cette édition 2023. Dans ma rétrospective 2023, j’avais compté près de 120 projets menés à bien l’an dernier (entre les logos, les peintures digitales, les aquarelles, les motifs de tee-shirts, les illustrations de roman, etc…) dont la plupart sont encore gardés secrets, et dont la plupart ont été réalisés pour des groupes français !

Si de plus en plus de groupes se tournent vers moi, c’est surtout parce qu’il y a du bouche à oreille et que chaque nouvelle pochette est une vitrine qui permet de faire connaître un peu plus Macchabée Artworks. Très souvent on vient me trouver en me disant “Salut, j’ai beaucoup aimé la pochette que tu as faite pour untel, je serais intéressé pour mon propre projet”, ou bien l’habituel “un ami m’a conseillé de te contacter” : c’est cool, parce que ça veut dire qu’au-delà des groupes qui ont besoin d’une pochette, les gens me suivent aussi simplement pour mon art. Ça fait vraiment plaisir, et je les remercie.

 

Y a-t-il une réalisation dont tu es le plus fier ? Si oui, pourquoi ? 

Là, spontanément, j’en ai quelques-unes qui me viennent en tête. Tout d’abord je pense aux deux fresques viking que j’ai réalisées pour Hrothgar (dont l’une concourt cette année dans la catégorie EXTREME avec Rise of Ragnarök) car elles ont demandé un temps et une patience hors-normes et traitent d’un sujet que j’adore. Ces deux œuvres que l’on retrouve sur les faces internes et externes du Digipack de cet album montrent la guerre des dieux nordiques contre les géants du feu et de la glace, et il se trouve que ce sont les deux premières œuvres que j’ai créées après la naissance de mon premier fils, elles ont donc une saveur toute particulière pour moi. Je pense aussi à la pochette d’Eminentia Tenebris (qui concourt aussi en EXTREME) car je la trouve magnifique, et que l’album est sorti chez Antiq, un label que j’adore et dont je possède bon nombre de CDs. Enfin, on parlait précédemment du fait d’être musicien et artiste, et je pense qu’une autre de mes plus grandes fiertés est d’avoir réalisé les pochettes pour mon ex-groupe Muertissima, et surtout pour Terreur Nocturne (qui concourt aussi en EXTREME cette année) : pouvoir donner forme et image à sa propre musique, c’est quelque chose de vraiment gratifiant et qui n’est pas donné à tout le monde !

 

Peux-tu nous livrer un exemple de collaboration qui t’a marqué ? 

Ah ben tiens, je vais parler de ma dernière collab’ de 2023 avec le groupe de Black lyrique et mélodique nommé DOSKA. Cette rencontre avec Aarunda, la tête pensante du projet, m’a marqué car il développe un univers très fort et original, un peu à la façon de Tolkien ou de Lovecraft qui proposent des histoires fondées sur des civilisations inventées et notamment des langages et coutumes créées de toute pièce. DOSKA raconte le terrible Destin d’une paisible vallée en proie à la folie du Pouvoir absolu, opposant le peuple pacifique libre des Kotthryens, qui vivent de manière rudimentaire mais heureuse, et les adeptes de Detth’rya, des fanatiques obsédés par l’atteinte de la domination ultime : la Doska, ou l’anéantissement total de toutes résistances.

Au moment où Aarunda m’a contacté, il avait déjà sorti un EP pour Doska et désirait une pochette pour son futur album. Après avoir pas mal discuté de son projet au téléphone, et abordé de nombreux points (dont son envie de commander un jour un triptyque sur le thème de son album), je me suis lancé sur sa pochette. Notre discussion m’a pas mal trotté dans la tête, et je lui ai finalement proposé de réaliser son triptyque en m’appuyant sur la pochette de son EP -qu’il avait lui-même dessinée avec beaucoup de talent- en proposant trois visions de la vallée des Kotthryens, avant, pendant et après le cataclysme dévastateur qui se trouve au coeur de son album. 

C’est pour moi un très bel exemple de ce que peut donner une collaboration en symbiose avec mes clients, un travail de co-création riche des sensibilités de chacun, qui permet de se dépasser et de se renouveler à chaque nouvelle œuvre. C’est d’ailleurs ce qui me plaît le plus dans mon activité artistique, car je peux sortir constamment de ma zone de confort tout en gardant mon identité et mon style propres.

 

Y-a-t-il un groupe pour lequel tu as réalisé plusieurs artworks ? 

Il y en a même quelques-uns, ce qui fait vraiment très plaisir puisque bon nombre de groupes avec qui je travaille reviennent vers moi pour leurs projets suivants ! 

Déjà, il y a Anthropovore (Black Metal) qui se trouve en quelque sorte à l’origine de Macchabée Artworks puisqu’il s’agit du premier groupe à avoir fait appel à mes services en dehors de Muertissima. Depuis fin 2020 j’ai réalisé leur logo, leurs 4 pochettes d’album, leurs livrets de Digipacks, 3 tee-shirts différents et une petite dizaine de visuels à l’effigie de la Bête -leur mascotte infernale qui se nourrit exclusivement d’humains. C’est une collaboration qui dure, et c’est vraiment intéressant pour un artiste car faire des pochettes, c’est un peu du “one shot” dans la mesure où l’on doit résumer l’album en une image et c’est tout. Ici, j’ai la chance de pouvoir étendre l’univers, le prolonger et le structurer sur plusieurs albums en créant une véritable cohérence !

Un autre projet qui a beaucoup fait appel à moi, c’est Inexistence, mené par Psycho du groupe de black dépressif et mélodique Suicidal Madness. Il s’agit de son projet perso Dungeon Synth et Dark Ambient, et depuis début 2022 c’est moi qui me charge de ses pochettes (cinq au total, il est sacrément productif le bougre !) ce qui permet de donner une forme bien particulière à son univers. Désormais je possède les 5 CDs, les 4 K7 et les 3 Tee-shirts à l’effigie de notre duo créatif (lui à la musique, moi à l’image) et c’est vraiment un plaisir de recevoir à chaque fois une nouvelle commande de sa part ! D’autant plus que j’ai travaillé avec deux autres de ses projets : Suicidal Madness et Nascitur Ab Integro. Une belle entente qui est visiblement faite pour durer !

 

Où peut-on voir les artworks que tu as déjà réalisés ? 

Principalement sur mes réseaux sociaux pour ce qui est des actus et des travaux relatifs au metal : Macchabée Artworks sur facebook, @macchabeeartworks sur Instagram. Également sur la plateforme ETSY pour mes peintures, dessins et aquarelles : j’ai une boutique en ligne sur laquelle je mets en vente des œuvres plus personnelles sur des thèmes de fantaisie principalement (Tolkien, créatures magiques, contes, etc).

 

Pour finir, pourrais-tu nous dire comment tu as connu les Awards de France Metal et ce que tu en penses ? 

J’ai découvert les France Metal Awards en 2022 lorsque l’album de Muertissima

Muertissima Inquisition

 

et le premier EP de Terreur Nocturne ont été sélectionnés pour les Awards 2023.

Terreur nocturne Solitude post mortem

 

Je trouve que c’est une excellente initiative qui permet de vraiment mettre en valeur notre scène metal nationale, et qui donne vraiment à chacun l’opportunité de faire connaître sa musique. Vraiment, j’espère que le concours a de belles années devant lui !

Sur ce, je vous remercie encore pour vos questions car ce fut un plaisir d’y répondre, et je souhaite à tout le monde de beaux France Metal Awards !

 

Que penses-tu de l’arrivée de l’IA dans la conception des artworks ?

 

Pour faire simple et court : je pense, comme énormément d’artistes, que c’est de la merde. Tant du point de vue moral, qu’artistique ou humain. L’art, contrairement à la technique, tire sa force des imperfections de l’artiste, de son style qui naît de tous les points qui le différencient des autres. Or, toutes les pochettes AI se ressemblent et sentent l’artificialité à des kilomètres, elles ont toutes la même tronche et n’ont aucune âme. C’est problématique, car les groupes qui en utilisent (petits ou gros, puisque même la pochette du prochain DEICIDE est faite par AI, la honte) montrent qu’ils n’ont que très peu d’estime pour les artistes, reléguant la pochette au rang de formalité qui doit coûter le moins cher possible plutôt que ce qu’elle est véritablement dans sa forme la plus noble : un prolongement de l’oeuvre musicale d’un groupe. C’est dommage, triste même, car je doute qu’on écoute réellement de la musique Metal AI un jour, alors pourquoi choisir une “peinture” AI comme pochette ? Bref, je ne vais pas déblatérer non plus sur le fait que l’AI pose des soucis de droits d’auteur en puisant dans des banques d’images non référencées, et qu’elle vole du travail à bon nombre de jeunes artistes qui souhaiteraient se lancer… Mais heureusement j’ai encore un peu foi en notre communauté metaleuse, très peu de groupes font appel à l’AI finalement. Il faut continuer de faire vivre l’art sous toutes ses formes !

 

Découvrez son site ici  .. certaines de ces oeuvres  de 2023

 

11 17 23 En Finir Resigne    11 05 23 Infamie Into The Necrosphere    09 03 23 Carn Colors With Your Flesh

 

05 08 23 Hrothgar Rie of ragnarook 300x300 1    09 29 23 Stoned Rebirth  08 04 Eminentia Tenebris Rise of a new Kingdom

 

12 18 23 Incinerator Rest In Piss    09 22 23 Soldout Oulldown

 

04 04 23 Psalterion Fins Cuer Loiaus          06 30 23 Syringa Paradoxe

 

 

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