Report par Sabrina M. Lozen – Photography / extrait vidéo kermhit
Jour 3 – 08/09/2024
C’est dimanche, Monsieur le curé a terminé son sermon dominical, et d’autres paroissiens plus chevelus/barbus/tatoués se préparent à sauver leur âme avec un autre type de messe purificatrice. Oui, je me demande aussi parfois où je vais chercher de telles intros…
L’entrée en matière nous emmène à la découverte de Old Silence sur la Menn Stage.
Venus d’Evry, le combo est clair dans son accroche. Jouer du Rock dans son essence la plus pure, sans artifices superflus. On se plonge donc avec entrain dans les années 90s et 00s, pour revisiter une musique vibrante et puissante qui pioche aussi dans le Grunge.
Avec une batterie qui sonne résolument Rock, le set assène un groove pêchu parfaitement adapté pour nous donner l’envie de sortir de notre torpeur matinale (oui, bon, il est 13h30, mais on se comprend).
A ce moment, le public est encore épars. J’ai envie de dire : tant pis pour les absents qui ont préféré la prêche de Monsieur le curé, nous, on ira au paradis du Rock ‘n Roll !
Un petit tour du côté de Versailles cette fois, avec After Us All, et son Rock Métal alternatif.
Nous voilà transporté à travers un univers musical dont le panel d’influences est varié, mais reste résolument Rock/Métal avec quelques incursions flagrantes du côté de la Pop.
Le tout est finalement relativement calme, voire apaisant, avec une chanteuse à la voix envoûtante, et des mélodies qui donnent envie de se balancer tranquillement pour éviter de renverser la première pinte de la journée.
Quelques passages plus sombres viennent un peu plomber la légèreté ambiante, histoire de nous rappeler qu’on n’est pas là pour apprendre le tricot.
On monte un peu en violence pour la suite, avec l’arrivée de Stratagème.
Formé en Île-de-France dans les années 70s, autant vous dire que les gars ont de la bouteille et n’ont plus grand chose à prouver (malgré un passage à vide de 28 ans avant leur reformation).
Ils déversent donc leur Hard Rock made in US qui penche vers le Heavy sans se fourvoyer, avec enthousiasme et (presque) désinvolture. Je dis « presque », parce que derrière une prestation énergique et enjouée, on sent que la qualité est au rendez-vous.
Les musiciens savent manier les fûts et les manches avec dextérité. Les guitares sont incisives et la rythmique musclée même si on reste très proche de l’esprit des années 70s, avant que la noirceur et la radicalité n’envahisse la scène extrême.
Et voici une de mes belles découvertes du week-end, le groupe Deficiency qui nous vient de Moselle.
Évoluant dans le Thrash mélodique, le combo ne se lasse pourtant pas de mélanger les genres, créant une musique agressive et riche. Alliant des influences old-school à des sonorités plus modernes, les variations se font sentir tant au niveau du tempo que de l’esprit général, tantôt nerveux et rentre-dedans, tantôt faisant place à des mélodies inspirées.
Celles-ci sont d’ailleurs bien présentes durant le set, dans un esprit très Heavy. J’ai d’ailleurs adoré leur son de gratte, subtil et incisif.
Si les accélérations et les blasts viennent réveiller notre rage primitive, des passages plus sombres n’hésitent pas à apporter une touche plus lugubre à l’ensemble. Et tout le pot pourri musical n’en reste pas moins diablement cohérent, j’adhère !
Le jour où j’ai annoncé ma venue au festival, on m’a dit avec enthousiasme « Tu vas voir ADX, quelle chance ! ».
Sauf que je me suis sentie très conne vu que je n’avais pas la moindre idée de quoi on me parlait. Et j’admets a posteriori que je ne suis pas fâchée d’avoir comblé cette lacune honteuse en découvrant enfin cette figure de proue du Heavy français des années 80s.
Un petit tsunami bien énervé dans la poire dès les premières notes, et c’est parti pour un tour de manège speed et épique durant 40 minutes ! Ça décoiffe, ça déboîte, au son de riffs endiablés et des guitares fulgurantes.
Les soli s’envolent dans les cumulo-nimbus qui se sont amoncelés sur Mennecy durant l’après-midi, de quoi se faire happer dans un tourbillon sonore imparable.
Quant à Phil, le chanteur, il hurle ses histoires de France ou ses thématiques fantastiques avec une frénésie qui ravit tout le monde. On est vraiment obligés de redescendre ?
C’est pas tout ça mais on a encore de la viande sur le tranchoir. Un petit passage du côté obscur de la scène nous attend avec Holy War.
Avec un bouc pentagrammé et flanqué de 4 épées comme visuel, ça donne le ton. Le tout en rouge, noir, et jaune, tout comme les grimages des musicos qui ne sont visiblement pas venu nous réciter le sermon de la messe de ce matin. Formé en 1985 à Rennes, le groupe défend un Speed/Thrash dans un esprit ostensiblement satanique.
Ok, ça fait un peu cliché, mais on s’en fout, ça fouette le sang efficacement, on n’en demande pas plus !
Pas de remise en question de l’esprit old-school ici, ça va à l’essentiel, avec des riffs blasphématoires, des hurlements possédés et des soli infernaux à gogo. Monsieur le curé va devoir user de la lance à incendie pour purifier le site à l’eau bénite.
On continue avec un petit détour au pays de Dante Alighieri (ça sonne quand même mieux que le pays de la pizza), avec le groupe de Métal progressif Eldritch.
L’Italie est décidément un pays où fleurissent de nombreux talents dans bien des domaines ! D’obédience Thrash ou Heavy selon les morceaux, les compos sont complexes mais tout en étant accessibles, variant les ambiances autant que les tempos.
Parfois sombres, voire mélancoliques, avec ce clavier qui nous arracherait le cœur par moment, la musique se fait atmosphérique avant de repartir en riffs musclés et accrocheurs.
Des mélodies aériennes répondent à des accélérations percutantes, par des détours instrumentaux qui pourraient être ennuyeux en live. Mais personnellement, j’ai été entièrement happée par la performance, et je ne suis pas la seule, au vu des visages béats qui pullulent dans la fosse.
Avec un nom comme Himinbjorg, ça sent le Pagan/Folk là, non ? Gagné !
Les Savoyards nous apportent même une offrande de Black Pagan enrobée d’une conscience écologique. C’est moins une hargne dévastatrice qu’une musique empreinte de mysticisme qui s’élève alors de la Eye Stage. Pas d’avalanche sonore crasseuse, mais d’hypnotiques mises en abîme rythmiques qui ne lésinent pas sur les mélodies.
Pas d’instruments folkloriques en live malheureusement, ce qui déçoit un peu mon âme de photographe, mais ça, c’est juste anecdotique. Les riffs gardent un esprit sauvage, et tendent mystérieusement vers le Thrash ou le Heavy par moment.
Pas de quoi partir en slams ou mosh pit, mais juste savourer pieusement cette ode à la Nature. Mon appétence de Blackeuse de l’extrême est quand même légèrement frustrée mais je sais que ça ne va pas durer avec la prochaine prestation.
Un petit interlude s’immisce ensuite, pour que Monsieur le Maire, accompagné des bénévoles, puisse monter sur la Menn Stage et remettre la guitare LAG au gagnant de la tombola. Le chanceux repart sous les applaudissements, avant la reprise des hostilités.
C’est au tour DU groupe qui m’a motivé à braver la région Île-de-France, et je me transforme donc en groupie hystérique attendant frénétiquement l’arrivée de Dark Funeral sur la Menn Stage.
Au milieu du décor de pentacles et de croix inversées, la sombre armée suédoise s’avance majestueusement en armure, et entame sa mélopée funeste. Le chanteur Heljarmadr, drapé de sa cape noire, lance un cri bestial, qui résonne dans le parc de Villeroy avec autant d’effroi que le cri du Grand-Duc. C’est parti !
Dans une déferlante de blasts et de rythmique froide, les mélodies s’immiscent dans les riffs noirs typiques de leurs compos. La batterie joue au rouleau compresseur pendant que les vocalises inquiétantes partent en loopings cauchemardesques.
Alors oui, ça reste très stéréotypé, si ce ne sont ces passages mélodieux qui rendraient presque le show plus chaleureux, mais il n’y a pas à dire, c’est un live somptueux et transcendant, qui apporte un vent glacé qui sent le souffre en ce dimanche pluvieux.
Me voilà gonflée à bloc pour appréhender la dernière ligne droite !
La suite a été un peu décevante à mon sens. Parce qu’un show de Deathless Legacy, c’est du Métal horrifique avec une scénographie épatante, et des musiciens charismatiques.
Sauf qu’il y a dû avoir un malentendu sur la Eye Stage, et la lumière est quasi inexistante ! Le fait d’à peine distinguer les Italiens dans la pénombre n’empêche évidemment pas de profiter de leur musique d’inspiration gothique et symphonique tout en étant terriblement efficace et énergique.
Ça décape avec ferveur, dans une atmosphère lugubre et sinistre. Quelques passages de clavier inquiétants alliés à des guitares acérées et aux growls de la chanteuse Steva rendent le set captivant, tout en étant accessible.
Malheureusement, l’expérience est estropiée d’une partie importante de son essence, vu qu’il est impossible de profiter pleinement de la mise en scène, toujours très impressionnante, dans cette pénombre.
Difficile de bien s’imprégner notamment de l’intervention de leur performeuse tantôt déguisée en nonne tantôt en démon ecclésiastique, et c’est vraiment dommage !
Entre-temps, les cerisiers du Japon et les lanternes se sont installés sur la Menn stage. Ceux qui vont souvent à des concerts ou des festivals vont tout de suite comprendre de quoi je parle dans la mesure où la tête d’affiche fait partie de ces groupes qu’on voit partout depuis quelques temps. Le succès fulgurant de Rise of The Northstar s’explique aisément par leur vision très personnelle du Hardcore, où s’imbriquent des influences Hip-Hop, mais aussi Nu ou Thrash.
Et bien entendu les références à la culture nippone, incontournable pour ces fans de Manga notamment.
Sur fond de riffs ravageurs, typiques Harcdcore, le chanteur Vithia passe avec une virtuosité sans pareil du growl au chant rapé avant d’asséner des hurlements bestiaux que même les soli Heavy n’arrivent pas à calmer.
Les Parisiens ont remis au goût du jour un Rap-Metal qui s’était un peu perdu, et cela pour le plus grand plaisir des festivaliers qui n’ont pas perdu une miette de cette apothéose de fin de festival, malgré une pluie qui commence à bien balayer les visages !
Le retour au bercail a été un peu sportif, sous une pluie battante, dans le noir, et dans un trafic toujours dense à 23h. Mais pas de quoi me dérouter, j’ai fait le plein de bonne musique, d’émotions et de souvenirs impérissables, de quoi me revigorer pour les mois à venir.
Le mot de la fin
Merci au Mennecy Metal Fest de porter avec fierté l’aura du Métal en Île-de-France ! Nous avons eu droit à 3 jours riches, avec une programmation éclectique avec de nombreux groupes talentueux, nous permettant aussi bien de (re)découvrir des formations émergentes de la scène nationale que des groupes de renommée internationale. Le site dans le Parc de Villeroy est très agréable et bien agencé, de taille raisonnable, avec des coins pour se poser tranquillement. L’orga était aux petits oignons, et les bénévoles au top. Pour ma part, un gros point positif, c’est l’accès au bâtiment pour les festivaliers, permettant de se poser, de recharger les batteries, et d’avoir accès à de vraies toilettes !
Et comme un live report sert aussi à ça, les 2 points d’améliorations que j’ai noté sont :
1/ améliorer la signalisation vers le festival, a minima une enseigne à l’entrée du parc
2/proposer les bières en demi-pintes
Félicitations à toute l’équipe pour l’accueil et la tenue de cet évènement qui, je n’en doute pas, continuera sur la voie du succès déjà bien entamée !