Report par Sabrina M. Lozen – Photography / extrait vidéo kermhit
Samedi 20/08
Après les 3 cafés indispensables du matin, me voilà prête pour entamer ce troisième jour de (re)découvertes musicales. Et il y a du potentiel, ça risque de ne pas me laisser plus de répit que hier.
La description du projet de l’artiste multi-instrumentiste norvégienne Sylvaine laissait présager un temps fort de la journée. Me voilà donc partie vers la Massey Ferguscène, prête à dégainer l’appareil photo et à m’immerger dans son univers post-Black métal.
Et là, c’est l’émerveillement. Évidemment, les longs cheveux de sirène de Kathrine Shepard, de son vrai nom, subjuguent directement, mais c’est surtout au niveau musical que se situe l’intérêt. La rythmique et le chant paraissent de prime abord aériens et envoûtants avant de se voir rattrapés par une déferlante sonore énergique et accrocheuse.
De quoi créer un contraste saisissant, alternant les passages de riffs lancinants et les cascades de hurlements viscéraux. Le genre de constructions qui me plaît. Trop énergique pour être du Doom, trop personnel pour du Black, on est à la croisée des chemins des tonalités mélancoliques et de la rage brute. Un coup de cœur !
On a déjà eu le Thrash américain, l’espagnol, il nous manquait le français. T.T.T. (Tribute to Trash) est là pour combler cette lacune.
Composé de musiciens issus de différents groupes comme Loudblast, Thrashback, Agressor, ou @TAG, il s’agit d’un projet…hommage au Trash ! Elle était facile, celle-là. Et il répond parfaitement à son pari.
Dès les premières notes, on prend une grande inspiration parce qu’on n’est pas certain de pouvoir respirer durant la longueur du set. La batterie est cinglante, les guitares hurlent plus fort que mon chat quand il réclame ses croquettes, le chanteur vocifère avec brio. Tout y passe, de Kreator à Destruction, on plonge dans le monde du trash de tout horizon sans retenue.
On en sort aussi décoiffés que les musiciens, mais dans notre cas, ce n’est pas la faute des ventilos !
Après ce moment d’énergie dévastatrice, je me dis qu’un petit interlude introspectif serait le bienvenu. Ça tombe bien, il y a Pénitence Onirique qui démarre sur la Massey Ferguscène.
Toujours aussi masqués que d’habitude, les membres du groupe nous distillent un Black métal mélodique prenant, ne révélant ses mystères ésotériques qu’au compte-goutte, dans une ambiance atmosphérique et lourde à la fois.
Personnellement, c’est le genre de groupe que je préfère voir jouer dans une petite salle obscure ou au fond d’une grotte pour bien m’imprégner de leur état d’esprit. Sur une scène de festival au milieu de l’après-midi, j’ai trouvé la prestation moins immersive. On fait comme on peut !
Il reste un créneau avant mes chouchous du moment que j’attends avec impatience. En attendant donc, je choisis un peu au hasard d’aller voir Coilguns, avec un autre photographe aussi peu convaincu que moi. Et là, on se prend la meilleure claque de la journée !
On m’avait annoncé du post-hardcore, ce qui a tendance normalement à me faire fuir à toutes jambes, mais en réalité, je doute qu’on puisse vraiment leur attribuer un style précis. On a du noise et du métal, du frénétique et du dissonant, du chaotique et du lancinant, bref un joyeux mélange corrosif. A croire que le quartet helvète prend un malin plaisir à déconstruire toute idée pré-conçue sur la musique, tout en gardant une vraie cohérence de l’ensemble. Du génie !
Mention spéciale pour le chanteur qui a dû avaler une pile électrique avariée avant de monter sur scène. Çà, c’est un front-man ! Entre grimaces intempestives, léchage de micro, ascension du pylône de baffles, et immersion dans le public, rien ne permettait d’affirmer qu’il n’allait pas finir le set sur une civière.
Bref, la qualité scénique et musicale était incontestable, et nous nous sommes félicités d’avoir bifurqué vers la Dave Mustage au lieu d’aller au bar.
Avec ça, je suis à fond pour aller voir mes chouchous d’Akiavel. La notoriété de ce jeune groupe de la région PACA ne cesse de croître ces derniers temps et c’est amplement justifié ! Comme à chacune de leur performance, ils nous mettent le pit à feu et à sang avec leur Death mélodique parfaitement maîtrisé.
Le son est énorme, la batterie est nuancée, la guitare et la basse se complètent avec efficacité, la complicité entre les membres du groupe est palpable.
Ce qui fait le charme du groupe, c’est aussi Auré, la front-woman aussi charismatique qu’expressive quand elle déverse son growl inquiétant sur le public. Presque une version féminine du Joker, à tel point qu’on craindrait presque qu’elle ne regarde vers l’objectif de peur qu’elle ne le fasse exploser !
Pour celles et ceux qui habiteraient dans une cabane isolée du plateau du Larzac et n’en auraient jamais entendu parler, un seul conseil : allez choper leur discographie !
Une fois n’est pas coutume, je décide ensuite de me frotter au Métalcore, avec Bleed from Within.
Bon, je suis courageuse mais pas téméraire donc je savais quand même que les Écossais ne font pas dans le plus pur style coreux, et on est clairement plus proche du Deathcore, voire du Heavy par moment. Les lignes mélodiques sont intéressantes mais sans être transcendantes à mon sens.
Une recette classique qui ne me laissera pas un souvenir impérissable. Mais au moins, j’ai essayé.
Je rejoins ensuite la scène où une fanbase hystérique attend frénétiquement l’arrivée de Sortilège. On peut sans conteste les surnommer les Iron Maiden français, même si la comparaison reste un peu hasardeuse à mon sens.
C’est vrai que leur Heavy déviant allégrement vers le Power est efficace, il cherche et trouve sans effort son public, même avec de nombreux morceaux peu connus de leur dernier album. La sauce prend immanquablement, et le show présente tous les attraits du genre.
Par contre, là où les Anglais célèbres de la NWOBHM misent sur des compositions complexes et variées tout en abordant une ligne directrice accrocheuse sur les refrains, les Français se focalisent sur la seconde. Mais finalement, en live, c’est largement suffisant pour faire lever les bras et briser les nuques !
Les Belges sont des grands spécialistes pour nous proposer des approches décalées, et ce n’est pas Brutus qui contredira cette affirmation, avec une chanteuse qui joue aussi de la batterie placée au devant de la scène.
Les compositions sont diversifiées, plutôt orientées post-rock à mon sens, même si certains les qualifient de post-hardcore. Dans tous les cas, c’est déconcertant à la première écoute.
Le chant est bien posé, parfois doux, parfois rageur, même s’il n’est pas percutant. La guitare fait son office mais sans réussir à capter l’attention, j’ai un peu de mal à rentrer dans l’ambiance, peut-être un peu trop décalée pour moi.
Le prochain groupe est tellement connu que je ne suis même pas certaine qu’il soit utile d’en parler. Moins que Metallica certes, mais on parle quand même d’un pionnier du trash métal allemand qui n’a plus grand chose à prouver, au même titre que Kreator ou Tankard. Sodom entre en scène avec classe et visiblement l’envie de montrer qu’ils ont toujours la pêche.
Au vu des changements récurrents de line-up au niveau des guitaristes, on pourrait s’attendre à une présence plus en retrait de ceux-ci par rapport au bassiste Angelripper, le seul membre original restant. Mais il n’en est rien et tout ce beau monde prend possession de la scène pour nous prodiguer leur show énergique et brutal.
C’est du bon vieux thrash germanique, moins orienté inventivité qu’efficacité, mais c’est bien ce qu’on espérait, on ne va pas se plaindre. Ça déboîte, ça fait headbanger, bref, ça électrise sans tergiverser en profondeur.
Allez, ce n’est pas tout ça, mais on a encore du pain sur la planche. Prochaine étape : Watain.
Je pourrais sortir les qualificatifs classiques du Black métal, « froid », « malsain », « sombre », etc…mais ça ne nous aiderait pas. Surtout que le premier n’est pas forcément approprié en live au vu des effets pyrotechniques et autres torches qui pullulent sur la scène.
On est sur les fondamentaux du genre, le but n’est pas de faire dans la subtilité et la délicatesse. Le son est bien abrupt, et mieux équilibré qu’avec Marduk hier, ça c’est appréciable. Bref, ce sont surtout les décors (avec la traditionnelle croix inversée évidemment), les costumes, et les grimages, qui marquent le plus lors du show à mon sens.
J’ai un peu l’impression d’avoir sauté involontairement dans une dimension parallèle quand je quitte les masques grimaçants des Suédois satanistes pour aller voir The Toy Dolls. Je risque le court-circuit neuronal à ce stade. En fait, si ça se trouve, je ne suis même plus au Motocultor ??! C’est pourtant bien la Bruce Dickinscène devant moi, mais j’ai 2 gars en costumes-cravates rouge et bleu à carreaux, lunettes de soleil fluo, et Doc Martens, qui déboulent en assénant un punk rock presque bourgeois, je suis perplexe.
J’apprends que le groupe existe depuis 1979 et je n’en avais jamais entendu parler ! Mais il faut dire que leur style est assez atypique, et je ne parle même pas au niveau vestimentaire. Ça fait très esprit British parodique, avec des compos simples, presque enfantines.
Finalement, la troupe nous amène un peu de légèreté acoustique sur ces terres finistériennes qui subissent les blasts et les growlings infâmes depuis 3 jours. Un peu d’humour décalé, ça détend en cette fin de samedi !
Allez, encore un saut inter-dimensionnel, je ne m’épargne aucune violence aujourd’hui ! Passer du punk humoristique à Amenra, ce n’est plus un court-circuit, c’est un barbecue de fusibles grillés. D’ailleurs, la fumée qui envahit le chapiteau atteste que mon hypothèse tient la route. Je sais que le groupe de Doom belge a la main lourde là-dessus, mais quand même. Pour les lumières par contre, c’est l’inverse, il faut la chercher.
Et la combinaison des deux amène quelques complications au niveau shooting. Mais ça ne m’étonnerait qu’à moitié qu’ils l’aient fait exprès, seraient-ils allergiques aux photos ? Même le chanteur s’y met en tournant le dos au public.
Bon, j’arrête de me focaliser sur ma frustration de photographe et je m’immerge dans l’univers du concert. Et là, il n’y a pas à débattre, ça passe très bien. On se laisse porter par l’atmosphère pesante, le rythme lent, la vision sombre des compos. Ça ne respire pas la joie, et c’est le but.
Ils voulaient nous emmener avec eux vers des contrées austères, froides et arides pour y méditer le sens profond de la vie et le désenchantement d’un monde vide de tout espoir, et ils ont réussi leur pari. N’en déplaise aux réfractaires au genre, ils mènent efficacement les auditeurs là où le veulent, sans retour possible.
N’étant plus à quelques sauts intersidéraux près, je me devais de finir avec un des groupes de référence du punk, j’ai nommé The Exploited.
On les savait rageurs et provocants, mais la pression des années a peut-être un peu adouci leur état d’esprit ? C’est assez calme pour un groupe de cette réputation. Enfin, sur scène parce que dans le public, ça dégénère bien comme il faut, la fosse s’enflamme, ça invective, ça scande les refrains avec hurlements asynchrones, bref, ça ressemble à un concert punk !
Je suis à peu près certaine que cette performance ne restera pas dans les annales de ces pionniers du genre, mais de toute façon, avec la carrière qu’ils traînent derrière eux, ils n’ont plus rien à prouver.
Après un retour fracassant sur le sol terrien, il faut maintenant que je régénère ce qui me reste de neurones pour attaquer le dernier jour avec entrain. Et non, ce n’est pas fini !