Report par Sabrina M. Lozen – Photography
Jour 2 – 21/10/2023
Il est 15h30 ce samedi, le soleil se cache régulièrement derrière une belle masse nuageuse, mais ce n’est pas ça qui va entacher notre moral. Je suis prête à participer à cette deuxième journée d’orgie, l’oreille affûtée et l’objectif aux aguets, à moins que ce ne soit l’inverse ?
On démarre avec White Sofa, venu directement de Tours pour nous déverser un métal bien ficelé, très indus dans son accroche, avec une influence Neo-métal très prégnante sur certains morceaux.
Des compos taillées pour le live à en juger par l’énergie qui déborde de partout.
Mais attention, tout est amené avec subtilité, pas de gros rythmes infernaux, mais du groove et des mélodies au milieu des cris rageurs. C’est puissant, profond, et le combo basse/batterie nous martèle un tempo meurtrier qui ravage déjà la moitié des neurones à peu près actifs en ce milieu d’après-midi.
On se prend ensuite une petite pinte ou un verre de pinard après cette première performance, avant d’aller apprécier un peu de Métal/Hardcore normand avec Primal Age.
C’est là que je me dis que j’aurais plutôt dû prendre une boisson énergisante, histoire de pouvoir suivre le rythme de ces sauvages ! Ça déménage sévère dès les premières minutes, c’est à se demander si on ne va pas tous mourir d’asphyxie tellement le groupe nous entraîne dans une folie destructrice sans même prendre le temps d’y mettre les formes.
Le chanteur tire aussi bien la langue qu’il ne hurle sa hargne sans retenue, ce qui a le don de galvaniser le public déjà bien énervé sous l’effet des riffs lourds et cinglants. Même si des mélodies n’hésitent pas à parsemer les compositions par moment, le set est quand même plus proche d’une enclume en plomb lancée avec énergie par nos hargneux que d’une envolée de cygnes gracieux.
Quand on sait qu’ils ont été parmi les premiers en France à fusionner le Métal et le Hardcore, on peut dire qu’ils ont réussi à porter la recette à son paroxysme. Nous voilà prêts pour affronter dignement la suite avec entrain.
Mais en réalité, c’est plutôt un moment de méditation qui nous attend avec Point Mort. On met donc notre frénésie au placard le temps d’un set, pour savourer le Post-métal sombre et lancinant que nous propose le combo parisien.
Et on est effectivement porté par une musique riche, structurée par une batterie hystérique avec des blasts écrasants. Néanmoins, le rythme est globalement lent, très lent par moment, limite catatonique. Avec un relent de désespoir fulgurant que la chanteuse, malgré son petit gabarit, instille dans nos veines avec ses hurlements déchirants alternant avec une chant clair.
C’est presque lascif même, les parties dissonantes et les changements de tempos rajoutant une dimension transcendantale somptueuse. L’odeur d’encens qui envahit la salle n’est pas faite pour nous sortir de cette profonde introspection musicale. En un mot, c’est puissant !
Pour persévérer dans les ambiances sombres et malsaines, c’est ensuite à Céleste de venir nous asséner un Black oppressant. L’ambiance est suffocante, tout comme la musique des Lyonnais. La scène est plongée dans le noir presque complet, hormis les lampes frontales rouges des musiciens.
Je m’imagine quasiment dans une forêt lugubre de Transylvanie à la tombée de la nuit, à guetter les hurlements des loups dans le lointain. Il faut dire que le chant pénétrant et torturé se prête bien à ce genre d’imagerie.
Les rythmiques lourdes et angoissantes soulignées par des distos grinçantes finissent de parachever ce funèbre tableau. Au milieu des leads obsédants, des passages lancinants proches du sludge, qui donne une dimension ostensiblement hypnotique aux compos.
Ok, pour la photo, c’était la méga frustration entre la fumée quasi opaque et les petites lucioles rouges comme repère, mais ça permet au moins de s’immerger encore plus profondément dans leur univers funeste.
Après ce bel et sombre interlude, il est temps de repartir vers d’autres contrées. Quand Deez Nuts monte sur scène, nous sommes littéralement catapultés dans une dimension folle furieuse.
Les Australiens ont décidé de transformer le Centre Culturel Jean Carmet en vaste champ de bataille avec son Hardcore énergique. Le public est réceptif et part en slams incontrôlés. Du côté musical, les sonorités et les rythmes sont très “cores”, assez classiques dans les constructions à mon sens.
On a bien quelques breaks plus lents au milieu de déferlantes de riffs nerveux. Sans être une moment d’anthologie, le show est efficace, la formule fonctionne, et à ce stade, c’est tout ce qu’on demande, à part peut-être une pinte de ΩPA.
On se rapproche tout doucement de la fin, mais ce n’est pas le moment d’être dissipés, puisque Rise of the Northstar, ROTN pour les intimes, a prévu de nous emmener faire un tour vers le soleil levant. Ce n’est pas parce qu’on habite en Île-de-France qu’on ne peut pas amener un peu d’exotisme dans nos vies, et ces ultra-fans de mangas sont là pour relever le défi.
Au cas où on ne l’aurait pas encore intégré, les lanternes et cerisiers sur scène nous donnent le ton. ROTN, c’est du Hardcore, mais beaucoup moins classique cette fois.
Un groove accrocheur pour démanteler les dernières cervicales encore en place, une influence hip-hop non négociable, des tempos lents, presque introspectifs par moment, dans un ensemble très orienté Nu-métal qui rend leur musique si personnelle et intéressante.
Pour ceux qui aiment sortir des sentiers battus, sachez que ceux des jardins japonais étaient construits en zigzags pour empêcher les esprits de s’approcher des maisons, ceux-ci ne pouvant se mouvoir qu’en ligne droite. Ok, je m’égare encore, mais il est certain que le quintette préfère les chemins en zigzags, voire de traverse, pour nous proposer une musique unique et pleine de surprises.
Il ne reste plus qu’à clôturer cette superbe édition avec les Lyonnais de Resolve.
Je ne sais pas si ce sont mes tympans qui ont explosé ou mes neurones qui ont grillé avec ces 2 journées intenses, mais pas moyen de qualifier leur musique de prime abord. Qu’à cela ne tienne, Wikipédia est là pour me sauver ! Metalcore !? Ok, je veux bien le croire mais ça me paraît très réducteur quand même. Ce que je peux dire pour ma part, c’est qu’ils ne semblent se restreindre à aucune catégorie formatée, les morceaux présentent des sonorités diversifiées, des ambiances étranges et déconcertantes par moment.
Leur approche sonne très moderne et originale, nous amenant avec aisance de la brutalité envoûtante à la délicate violence, avec comme objectif à peine voilé de nous faire perdre tout repère.
Avec un chant irréel par dessus tout, on entend passer des sonorités prog, pop, death, etc, le tout avec une cohérence épatante. Difficile de décrire en mots un tel groupe, il faut vraiment l’entendre pour le croire !
Cette fois, c’est fini. Mais personne n’a envie de s’en aller, alors on traîne un peu, prétextant d’avoir absolument besoin de s’hydrater sous peine de crise de démence. Il faudra bien quand même partir un jour, avec les oreilles qui grésillent encore un peu et les cervicales disloquées, tout en se promettant de remettre le couvert l’année prochaine !
Le mot de la fin
Pour résumer mon expérience de l’Omega Sound Fest, je dirais que j’ai été épatée. Pour un évènement qui n’en est qu’à sa 4ème édition, l’orga a orchestré le tout avec un professionnalisme qu’on ne rencontre même pas dans certains festivals implantés depuis des décennies. Évidemment, je n’ai vu qu’une partie de l’ensemble, et il est possible que, dans les backstages, c’était un vrai foutoir, mais ça, le public ne l’a pas vu si c’est le cas. Quoi qu’il en soit, en tant que festivalière, tout était présent pour faire de ce fest un moment épique où on a envie de revenir. Rien de manquait, la sécu a géré les aspects délicats avec efficacité, il y avait un stand prévention contre les violences sexistes et sexuelles, une offre diversifiée en bouffe et boissons, des bancs et tables à l’extérieur pour manger tranquillement, un barbier, des tatoueurs. Ils ont vraiment pensé à tout !
Au niveau de la programmation, il y avait de quoi contenter tout le monde, et pas de problèmes de son majeurs décelés à mon niveau. Il y avait aussi un objectif manifeste de donner l’opportunité à des groupes locaux de se faire connaître, c’est une très belle initiative. Je n’ai pas non plus remarqué de files excessives aux différents stands (le cauchemar dans de nombreux fests), ce qui est appréciable. Et d’après les retours que j’ai pu glaner ici et là, mon expérience rejoint celle de nombreuses personnes présentes.
Bref, je tire mon chapeau à toute l’orga d’avoir fait de ces 2 jours un instant mémorable. Mention spéciale aussi à l’équipe des bénévoles qui étaient tous adorables et motivés. Enfin, juste parce qu’il faut bien trouver un truc à redire, est-ce qu’on pourrait enlever ces p…. de sub/enceintes du pit photos l’année prochaine ? Ou alors, on vire les gens de la Sécu et on enchaîne les festivaliers pour éviter les slams ? Ce sont juste des suggestions bien sûr. En tout cas, j’ai hâte de voir ce qu’ils vont nous concocter pour 2024 !