Report par Sabrina M. Lozen – Photography / extrait vidéo kermhit
Jour 2 – 10/08/2024
La douche froide : check. Les pains au chocolat industriels : check. Les 2 Monsters : check. Le tri des photos de hier : je le ferai plus tard. C’est bon, je suis fin prête pour suer sang et bières sous un soleil de métal qui ne semble pas vouloir faire grève de sitôt.
Le groupe qui a la lourde tâche d’intensifier les gueules de bois ou de mettre dans l’ambiance les nouveaux festivaliers à 14h s’appelle Black’N Red.
Originaire d’Angoulême, le combo officie entre le Rock et le Blues, avec une rythmique efficace entrecoupée de soli grinçants ou tourbillonnants.
Le tout est porté par une front-woman déchaînée à la voix chaude et profonde, qui sait comment stimuler les esprits encore embrumés de la veille, en lançant un Madison au milieu du pit.
Le public se laisse volontiers prendre au jeu, et l’esprit du Blues ressuscite avec bonheur le temps d’un set haut en couleur. Un démarrage tout en subtilité.
On reste encore un peu dans la région puisque Theorem nous vient de Bordeaux.
Le style monte quand même en brutalité. Ça sonne comme du Death, mais en plus soft, avec des mélodies qui dirigent clairement les compos. On a aussi des breaks appuyés, des rythmiques leads ou syncopées, un chant clair, et des sonorités léchées assez modernes.
On se rapproche donc du Death mélodique mais plus moderne que mes groupes phares des années 90s-début 00s, avec un je-ne-sais-quoi de « core » mais qui reste très métal. Oui, j’aurais pu dire Metalcore, mais ça aurait été trop facile, et trop stéréotypé pour définir leur musique, alors je reste sur ma position.
Vous l’aurez compris, leur musique est assez personnelle pour ne pas tomber dans le piège des cases trop étriquées, même si les fondamentaux des 2 styles précités forment quand même la colonne vertébrale de tout le set.
La chaleur a progressivement transformé le site en cocotte minute de l’enfer, et celui-ci manque clairement de points d’eau. Il ne reste que l’option verre d’eau payant, ou glace dans mon cas, histoire de rester vaillant et profiter du reste de la programmation qui nous promet encore pas mal de temps forts. A 16h, ce sont les Bordelais du jeune groupe Fhorce qui viennent assaillir la scène avec leur Metalcore nuancé.
Car même si la rythmique est explosive, les riffs rageurs, les compos globalement brutes de décoffrage, des passages plus mélodiques et/ou sombres apportent une teinte plus douce version Neo Metal.
Le chant est prenant et les riffs parfois obsédants, menant à une prestation efficacement brutale mais néanmoins subtile.
Il fallait s’y attendre, mon âme de Deathster se réveille ensuite dès les premières notes du set d’Akiavel.
J’ai beau avoir assisté à pas mal de leurs performances ces dernières années, je n’arrive toujours pas à me lasser du Death old school à tendance mélodique de nos joyeux lurons de la région PACA.
A chaque fois, c’est l’extase ! Avec une musique puissante, mêlant atmosphère glaciale et rythmique accrocheuse, les morceaux passent d’accélérations violentes à des passages plus lents et sombres. Dans tous les cas, c’est cinglant, assourdissant, hypnotique.
Quant à Auré, la front-woman charismatique, elle fusille encore et toujours la foule de son regard machiavélique adoubé d’un sourire à faire frémir le plus blasé des Blackeux.
Vous l’aurez compris, Akiavel a encore une fois retourné le pit, pour le plus grand plaisir de tout le monde !
Et si on reprenait un peu de Hard Rock pêchu pour ne pas mourir de déshydratation ? Voilà Koritni tout à fait disposé à répondre à nos attentes, quelle chance !
Hormis le fondateur, chanteur et guitariste Lex Koritni qui nous vient d’Australie, le reste du line-up est entièrement français, et ils savent y faire pour mettre le feu au poudre !
Le but n’est pas de révolutionner le genre mais de passer un bon moment à rocker dans la fournaise sur des compositions percutantes, entre Guns N’Roses et AC/DC.
En saupoudrant le tout de quelques grooves très blues et des envolées de soli délirantes, la recette sent bon le bitume et le cuir tanné. Rien de tel pour garder le sens du rythme par cette chaleur suffocante !
Une fois revigorés, on peut maintenant se frotter au Thrash particulier de Heart Attack, originaire de Cannes.
Très old school dans son essence, les riffs dynamiques et la batterie brutale incitent immanquablement au headbang avec une énergie non feinte. Ça décime plus vite qu’une épidémie d’insolation !
Et pour couronner cette rage, des soli qui s’envolent en mélodies travaillées dans le plus pur style heavy/power. Et puis bam, on se prend une bonne dose de mid-tempo oppressant et glacial en pleine face, sans qu’on ait rien vu venir.
Ça groove, c’est percutant, et la fosse signifie joyeusement son plaisir en faisant voler la poussière, les pintes et les slams. Une prestation excellente, qui m’a bien plus marqué que la dernière que j’avais vue d’eux, l’année passée au Motocultor. Long live Thrash Metal !
Bon, là, j’ai rien compris à la suite. On m’annonce Benighted, jusque là, tout va bien. Je les ai déjà vu souvent en live, dans des salles obscures, où l’ambiance m’incitait plus à l’introspection et à la mise en exergue des recoins les plus sombres de notre psyché qu’à un enthousiasme débordant de fanfaronnade.
Et là, je me retrouve face à un groupe survolté, vociférant un Death brutal et enragé dans une euphorie proche de l’apoplexie. Encore une fois…WTF ?
Bon, je ne vais pas me laisser déstabiliser et je m’imprègne sans difficulté du set des Stéphanois. Entre riffs fulgurants et martèlement sauvages, les hurlements délirants, entre growl et scream, font corps avec le tempo dément. C’est death, grind, deathcore, et ça déménage !
Ouf, mon honneur est sauf, je décèle quand même quelques passages plus lents et sombres dans la mêlée infernale. Mais bon, j’avoue que ça reste quand même anecdotique au milieu de la fulgurance de ce show.
Histoire de calmer les palpitations cardiaques, c’est Zeal and Ardor qui s’installe ensuite.
Le projet de Manuel Gagneux a tout pour me séduire sur le papier : mélanger le Black avec des styles « negro spirituals ». On est bien dans l’expérimental, surtout que les compositions prennent un malin plaisir à mélanger bien d’autres influences, avec des touches d’Indus ou de Blues, tout en maintenant une trame ténébreuse et froide qui donne envie d’invoquer le Cornu.
Et pourtant, chaque aspect n’est pas juste posé là dans une espèce de château de cartes instable, le tout est harmonieusement imbriqué pour former une cohérence sans faille où chaque note, sonorité grinçante ou profonde, chaque hurlement de rage, est exactement là où il doit être. Du grand art.
Malheureusement, j’ai toujours beaucoup de mal à rentrer dans l’univers de ce groupe en live, et je continue à penser que leur musique s’apprécie mieux au calme chez soi. Ce qui n’est pas l’avis de mes collègues qui sont conquis, et c’est très bien ainsi !
Pour l’avant-dernier groupe, on retourne chez les Ricains avec Born of Osiris.
En matière de Deathcore, le quartette fait office de référence avec leurs compositions puissantes et brutales.
Mais même si la violence est le fondement indéniable du set avec une rythmique qui dégomme tout sans pitié, leur musique est aussi technique et s’offre quelques variétés mélodiques qui allègent un chouia la lourdeur ambiante.
En tant que grande adepte de musique complexe, j’aurais dû être complètement portée par leur prestation, mais il semble que mes synapses aient subi une crise de catatonie, et je suis restée de marbre. Mon attention n’a été captée par aucun passage dont la virtuosité n’était pourtant pas en reste. Une manque de variation dans les morceaux ou une fatigue qui me fait doucement sombrer vers l’état de méduse ? Difficile à dire.
Il est temps de clôturer cette seconde journée intense, avec la prestation tant attendue des Ukrainiens de Jinjer.
Comme on pouvait s’y attendre, la chanteuse Tatiana Shmailyuk s’empare de la scène avec son charisme habituel, portant sa voix dévastatrice aussi bien en chant clair qu’en growls sinistres aux nues.
Quant à la musique, c’est propre et carré, faisant montre d’une technicité parfaitement maîtrisée. Les compositions mêlent sans ambage Métal progressif et grooves, dans une ambiance sombre et tourmentée par moment, emplie de rage à d’autres. Un set qui nous fait passer par toutes les strates émotionnelles possibles, alliant lourdeur, guitares cinglantes, dissonances, fulgurances rythmiques, et moments plus apaisés, histoire de nous déboussoler complètement.
Et malgré le côté peut-être un peu trop léché de la performance, j’apprécie cette musique riche et diversifiée avec le peu de neurones actifs qui me restent. Visiblement ,je ne suis pas la seule, la fosse est en émoi, et compte bien profiter du moment jusqu’à la dernière miette !
Retour sur le parking afin de terminer tranquillement la soirée avec les potes, puis retour au camping. Visiblement, certains ont décidé d’organiser une réunion « lancé de pêtards – rires gras – hurlements » juste devant ma tente. Et je suis trop fourbue pour aller chercher des pierres à leur lancer. Cette nuit va encore être courte…